Tournons la page – Séminaire panafricain Ouagadougou : Synthèse des éléments pour la déclaration finale
ATELIERS DU MARDI 26 ET MERCREDI 27 JANVIER
THEME1 : PROCESSUS ELECTORAUX ATELIER 1: LIMITATION DES MANDATS ET GOUVERNANCE LÉGITIME.
1. Les mobilisations des sociétés africaines restent souvent cantonnées à l’intérieur du cadre national, il serait important d’avancer dans la concertation de la mobilisation de la société civile panafricaine en vue d’œuvrer pour l’alternance démocratique sur le continent.
2. Dans cette perspective, il serait important de créer un Forum des Sociétés Civiles Africaines pour participer de façon autonome aux instances et rencontres internationales et peser plus fortement sur l’opinion publique et les médias.
3. Les actions de plaidoyer et de mobilisation sociale sont des instruments importants en vue d’imposer une bonne gouvernance démocratique dans nos pays. Ces actions doivent être amplifiées et renforcées. Dans cette perspective, il faut veiller à bien mettre en relation les enjeux de la lutte contre la pauvreté avec ceux de la lutte pour la démocratie.
ATELIER 2: MON VRAI VOTE C’EST MON POUVOIR.
1. Les organisations internationales ont un rôle important à jouer dans le contrôle des processus électoraux à condition qu’elles veillent à leur indépendance vis à vis des de tout pouvoir et qu’elles s’imposent de regarder les élections comme des processus globaux qui s’inscrivent dans la durée.
2. Une grande partie des mécanismes de fraude se font en amont du processus électoral. Le contrôle et la gestion du fichier électoral est ainsi un enjeu majeur. Les sociétés civiles doivent alors se coordonner et agir donc en amont des processus électoraux (exiger des audits indépendants, créer les conditions pour que les jeunes obtiennent leur carte d’identité, inscription dans les registres, retrait deas cartes électorales, etc.). Conjointement, il faut être capables d’assurer une présence et une pression citoyenne après le vote (post) en assurant notamment la protection des leaders sociaux les plus exposés (je vote, je reste).
3. Vu le verrouillage des processus électoraux par les gouvernements, il faut penser à coupler les actions de contrôle citoyen avec celles de la rue, et la diversité des formes de l’insurrection citoyenne.
4. Il faut lutter contre l’ignorance, la banalisation et le désintéressement des populations à l’égard du vote (notamment des jeunes et des femmes) et de la politique en général par des actions pédagogiques d’éducation civique autour du rôle, droits et devoirs des différents acteurs de la société. Ce qui est en jeu dans cette perspective de construction de pouvoir citoyen est la capacité d’être en phase, en relation avec les dynamiques sociales des femmes et des jeunes notamment. Les rôles d’un discours alternatif, nouveau, de la créativité et des formes d’expressions culturelles sont ici essentiels.
ATELIER 3 PROCESSUS D’OBSERVATION DES ELÉCTIONS
1. Une prise de conscience. Afin de contribuer à la transformation de la citoyenneté africaine en électeurs maîtres de leurs propres destins, les OSC doivent former et informer les acteurs sociaux plus vulnérables et influençables.
2. Les évolutions positives suivantes sont à noter :
− Nouvelles technologies
− Numéro d’identification unique des électeurs (NINA au Mali) qui permet d’éviter la fraude − Systèmes de traçabilité des bulletins de vote
− Nouvelle implication de l’église ou de mouvements citoyens locaux non religieux en amont
du processus électoral et d’un bout à l’autre du processus, y compris jusqu’à la compilation
parallèle des résultats.
Il est regrettable que de telles évolutions positives n’aient réussi à s’imposer que dans des situations post conflits ou post insurrection (Mali, Burkina Faso, République Centrafricaine??), les régimes autocratiques en place verrouillant et manipulant à leur guise les processus électoraux qu’ils organisent (“on n’organise pas des élections pour les perdre”), ce qui explique leur acharnement à faire sauter le verrou de la limitation du nombre de mandats.
3. Construire la démocratie par la base, d’où la nécessité d’élections locales. En effet la transparence des processus électoraux et l’observation des élections sont plus efficace lorsqu’elles sont organisées au niveau de collectivités locales élues.
Les OSC doivent exiger des partis politiques qu’ils intègrent eux-mêmes les valeurs démocratiques dans leurs structures afin de susciter la confiance des électeurs. Les OSC doivent interpeller les leaders politiques afin d’éviter la fragmentation de partis politiques partageant les mêmes options politiques. Il est également nécessaire d’œuvre à favoriser la création d’alliances entre partis politiques sur la base de programmes et d’idées communes.
4 Quelles coopérations envisageables ?
− Echanges entre les différentes commissions électorales
− Recherche et demande d’assistance à des experts reconnus
− Synergie entre les organisations et mouvements de la société civile à trois niveaux
- ⋅ Niveau national : observatoires nationaux
- ⋅ Niveau sous-régional : recherche et assistance d’experts reconnus et maintien d’un réseauprofitant des expertises et expériences des uns et des autres
- ⋅ Niveau international : pour agir ensemble sur des cas concrets, sur le terrain (Exempleréseau Tournons La Page).
ATELIER 4 : DE L’OBSERVATION CLASSIQUE À L’E-OBSERVATION
1. Il existe une multiplicité d’outils des NTIC et des réseaux sociaux qui peuvent être mis au service du contrôle citoyen des processus électoraux. Les sociétés civiles doivent renforcer la maîtrise de ces outils, définir des méthodologies d’usage de données adaptées afin de bâtir des systèmes alternatifs de veille électorale efficaces et indépendants des pouvoirs en place.
2. Il est bon de bien identifier les objectifs des processus d’observation électorales, de s’interroger sur la légitimité des actions et des organisations qui les portent pour éviter que ces processus deviennent des alibis des pouvoirs en place.
3. Les initiatives d’observation électorale pour qu’elles soient efficaces doivent s’intégrer dans un processus global de contrôle citoyen des élections. ce processus démarre bien avant l’élection.
ATELIER 5 : COHÉSION SOCIALE ET ELECTIONS APAISÉES
1. Les différents acteurs de la société civile doivent travailler à la consolidation de la paix sociale. Ils doivent porter haut et fort le message selon lequel la préservation de la paix est une affaire de tous et elle transcende toutes nos divergences idéologiques ou partisanes. Pour ce faire les acteurs de la société civile doivent :
- initier un dialogue interreligieux susceptible de faire comprendre et d’intégrer les dignitaires de chaque confession religieuse à l’exigence d’une cohésion sociale.
- créer en amont et en aval des élections des cadres de concertation à la fois politiques et sociaux pour poser de façon collégiale les bases d’une société de paix et d’acceptation de l’autre.2. Il faut que les mouvements citoyens aillent au-delà de la simple observation classique des élections. Ils doivent plutôt procéder à un réel accompagnement des processus électoraux. Il faut commencer par une conscientisation des masses citoyennes, installer et former partout des agents de paix et de leaders d’opinion. Pour ce faire il est nécessaire de:
créer une faitière exclusive à même de fédérer toutes les organisations de la société civile de sorte à pouvoir parler à toutes les couches sociales. Il y a là une réelle exigence de travailler en réseau non seulement à l’échelle nationale mais aussi à l’échelle continentale.
ll faut que les mouvements citoyens mobilisent des ressources propres pour pouvoir être véritablement indépendants dans la surveillance et l’observation des processus électoraux.
3. Que peut faire alors la coalition Tournons la Page ?
- Prendre position et dénoncer toute option qui menace la paix et la stabilité dans lesdifférents pays.
- Prôner des réformes profondes des systèmes électoraux taillés sur mesure.ATELIER 6 : L’EXEMPLE DU BURKINA FASO
1. Le Burkina Faso a, depuis son indépendance, une tradition historique de contestation et d’insurrection dont le but est d’amener les dirigeants à répondre aux aspirations profondes du peuple.
Le mouvement insurrectionnel qui a abouti au départ de Blaise Compaoré en 2014 a en réalité commencé depuis l’assassinat de Norbert Zongo. Il est la preuve que le peuple tenait lui-même en main la solution au manque de justice sociale, de déni de justice et de mal gouvernance qu’il subissait depuis des années.2. L’un des facteurs clés du succès des mouvements citoyens réside dans leur capacité à travailler pour établir des rapports de force :
- en optant toujours par le terrain, par la mobilisation sociale à travers des débats démocratiques à la base, ouverts et accessibles aux populations (synergie)
- en inscrivant cette mobilisation dans la durée et en positionnant la bataille sur le terrain de la justice sociale3. Au Burkina Faso, c’est la conjugaison des forces de différents OSC (institutionnels) et de mouvements citoyens qui a conduit au changement désiré. Ce changement qui a pour objectif de contraindre les dirigeants à la pratique de la reddition des comptes doit, pour être efficace s’ancrer également dans la pratique des diverses structures (OSC, administrations, organisations de parents d’élèves…).
4. La réflexion, l’anticipation voire l’élaboration de scenarii ont joué un rôle important dans le succès de l’action du Balai Citoyen. Le mouvement a su à plusieurs reprises prendre ses
responsabilités, et ses distances vis-à-vis des partenaires du monde politique afin de maintenir le cap des orientations et des décisions prises par ses organes de direction (autonomie).
THEME 2 : CONTRÔLE CITOYEN ET SUIVI BUDGÉTAIRE
ATELIER 1 : CONTROLE CITOYEN DES DEPENSES PUBLIQUES: FACTEURS DE SUCCES ET POINTS DE BLOCAGE
1. Les organisations de la société civile africaine doivent faire face aux modèles d’économie postcoloniale basés sur le gaspillage des ressources naturelles, l’évasion fiscale et la corruption systémique des États et ses gouvernants, dont la France est complice. Pour ce faire il est nécessaire de :-
Favoriser des ententes avec des fonctionnaires publics, des députés, des Ambassades et/ou des organisations internationales (Banque Mondiale, FMI) afin de contourner les obstacles et accéder aux documents nécessaires pour le suivi budgétaire (budget).
Produire des rapports et organiser des rencontres avec des acteurs impliqués dans la gestion budgétaire publique-privée afin de créer des alliances et développer des outils de plaidoyer. Développer des compétences au sein des OSC sur la veille/suivi budgétaire à travers des alliances régionales et internationales.
Créer/Renforcer des réseaux locaux de veille citoyenne, des lanceurs d’alertes ou des observateurs locaux afin de vérifier l’état de la mise en place des projets publiques (éducation, santé, etc.).
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2. Il est nécessaire de profiter du cadre juridique international afin d’approuver et de mettre en œuvre des lois de transparence capables de rendre accessible aux OSC les informations concernant les budgets publics, l’état des dépenses, etc. Dans ce cadre, il faut empêcher les entreprises bénéficiaires des projets publics d’accéder à la signature de nouveaux contrats si elles n’ont pas respecté les contrats signés au préalable.
ATELIER 2 : CONTRÔLE CITOYEN : COMMENT MOBILISER LA SOCIÉTÉ CIVILE ?
1. La création d’alliances d’ OSC est fondée sur la base de la construction d’une vision partagée qui n’est pas donnée et qu’il faut construire. Ces alliances doivent intégrer la complémentarité des compétences organisationnelles, le droit à la divergence entre elles, le respect de la pluralité et la diversité des modes d’action ainsi que la nécessaire confiance mutuelle résultant du processus de mise en réseau.
2. Les OSC doivent dépasser une culture managériale qui a parasité les modes d’action d’une partie importante des organisations gestionnaires de projets financés par des bailleurs de fonds internationaux. Il est nécessaire de faire face à la complexité des problèmes avec des logiques et des modes d’action propres, adaptés aux réalités et besoins locaux.
3. La campagne Tournons la Page est un espace qui pourrait renforcer la mise en réseau des OSC à travers le partage d’expériences locales et nationales, la mise en commun d’approches et des modes d’action ainsi que le lancement d’alertes en cas de danger d’un de ses membres ou alliés.